MOTO GP .....Poncharal: " Stoner est fort "

Hervé Poncharal, directeur du team Tech3 (Yamaha), revient sur les grands bruits qui ont couru tout au long de l'intersaison. L'ancien patron d'Olivier Jacque évoque également, avec optimisme, la saison à venir en MotoGP.

Certains bruits annoncent que Honda chercherait à revoir les règles au niveau de la motorisation des machines alors que c'est pourtant Honda qui a plus ou moins poussé la Dorna à un passage en 800cc. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet et quel est votre avis si ce fait était d'actualité?

Hervé Poncharal: Je vais être clair là-dessus. Tout cela ce sont des idées complètement fausses. Honda ne décide de rien unilatéralement. Je ne suis pas là pour prêcher leur paroisse mais ils ne poussent pas à changer les règlements. Les décisions techniques concernant la motorisation, la cylindrée adoptée, sont prises par le MSMA (Motorcycle Sport Manufacturers Association), l'association qui regroupe tous les constructeurs. De là, chacun d'entre eux exprime sa voix en commission et les règlements sont ensuite adoptés. Et puis, ce genre de décision est également pris en concertation avec les pilotes.

D'un point de vue technique, un grand nombre d'écuries sont passées à une motorisation à valve pneumatique. Qu'elle est la différence avec un système classique ?

H.P: Pour faire simple, le système à valve pneumatique permet de monter plus en sécurité dans les tours par minute. Ce qui veut dire que l'on peut augmenter cette valeur et ainsi gagner quelques chevaux. Il faut savoir que les 800cc sont très puissantes et que le système classique n'est plus adapté à ces machines. Un système classique a une commande de soupape par ressort or, si vous montez très vite en régime il y a des risques que le ressort s'use très vite voire qu'il se casse. C'est donc pour cela qu'on utilise ce système, pour que cela soit plus confortable pour les pilotes.

Êtes-vous vous-même passé au "pneumatique" ?

H.P: Tech3 est une écurie satellite donc nous dépendons de Yamaha qui nous envoie ses moteurs. Nous avons juste le droit de faire quelques réglages, de toucher aux suspensions et de retoucher quelques détails. Sinon, Valentino Rossi et Jorge Lorenzo travaillent déjà avec le pneumatique depuis le début des essais hivernaux. Normalement, et si tout se passe bien, nous le recevrons à partir du troisième Grand Prix qui se déroulera à Estoril.

Valentino Rossi et Loris Capirossi ont vivement critiqué à l'intersaison le contrôle de traction, jugeant qu'il ne mettait plus en valeur les qualités de pilotage intrinsèques. Les deux hommes ont ainsi avancé que Stoner a gagné le titre, en partie, car il avait un très bon "contrôle de traction". Carmelo Ezpeleta s'est d'ailleurs refusé à le remettre en cause. Votre avis là-dessus?

H.P: Là encore, ce sont des rumeurs plus ou moins vraies. Il faut savoir que Rossi et Capirossi font partie de cette commission des pilotes (ndlr : ils sont au nombre de cinq) qui décident si on met le contrôle de traction ou pas. Dernièrement à Jerez, il y a eu une réunion de la commission. Elle a décidé à l'unanimité de ne pas revenir sur ce système. Personnellement, je ne pense pas que cela change quoi que ce soit. Chacun a son style, chaque pilote fait ses propres réglages et après il y a la réalité de la course. Et si la Ducati avait permis à Casey Stoner d'être titré alors pourquoi Capirossi a-t-il autant été en difficulté ? Sûrement parce que Stoner était plus fort. La moto ne fait pas tout et ce sont heureusement encore les pilotes qui font l'essentiel du travail. Par contre, si jamais il y avais trop d'aides sur le plan électronique, on pourrait changer de voie.

Et Rossi dans tout ça ?

H.P: En revanche, c'est exact que Rossi a critiqué le « traction control » mais avec tout le respect que je lui dois, et je sais que c'est un grand champion, il faut qu'il admette que Stoner lui a été bien supérieur l'année dernière et ce n'est pas le fait uniquement de la Ducati.

De la même manière, le patron de la Dorna a dû répondre au fait que la MotoGP manquait cruellement de spectacle depuis plusieurs années...

H.P: Je ne suis pas du tout d'accord avec cette idée. L'année dernière, c'était la première année en 800cc et quand on change de cylindrée, les équipes doivent s'adapter à ce changement. Rappelez-vous, c'était la même chose lors du passage de la 500cc à la 990cc, le spectacle était là-aussi loin d'être au rendez-vous. Deuxièmement, quand vous voyez la saison 2006, ce superbe final entre Elias et Rossi à Estoril, les arrivées très serrés qu'on a vu aussi cette année là, Hayden qui remporte le titre de très peu, on ne peut pas dire ça. Et puis il y a eu aussi les bagarres entre Rossi et Gibernau quand on remonte un peu plus loin.

La faiblesse du plateau, le plus faible depuis une quinzaine d'années, va-t-il dans ce sens également ?

H.P: Carmelo (Ezpeleta, le patron de la Dorna) fait tout son possible pour qu'il y ait des pilotes en MotoGP, pour pousser les constructeurs à avoir chacun une machine sur un team satellite. Or, Kawasaki et Suzuki répondent qu'ils ne peuvent pas car c'est au-dessus de leurs moyens techniquement. Je pense qu'un plateau idéal serait de 20 à 22 membres et si c'est pour avoir 25 ou 30 pilotes mais avec des écarts énormes cela ne sert à rien. Je préfère avoir 15 ou 18 motos mais d'un niveau très homogène. Je pense que c'est déjà le cas. On aura une belle saison à mon avis.

Faut-il revoir les conditions d'entrée dans la catégorie afin que plus de pilotes soient sur la grille de départ ?

H.P: Tout est géré par des succursales de chaque constructeur. Honda, Ducati, Yamaha et les autres jouent sur plusieurs tableaux (Superbike, 125, 250, Superstock, etc..) donc les moyens mis en &oeliguvres ne sont pas illimités. Par exemple, une preuve que Ducati progresse est que la firme italienne commence à se désengager du Superbike alors qu'elle y était ultra-dominatrice avant.

Que pensez-vous des courses de nuit, sur le plan du spectacle, de la sécurité des pilotes? Est-ce une bonne chose?

H.P: Les pilotes ont effectué plusieurs essais à Losail dans les conditions prévues lors du Grand Prix et la plupart ont été absolument bluffés par ce qu'ils ont vu. Les éclairages sont exceptionnels et James (Toseland) m'a confirmé qu'on roule presque comme en plein jour. Sur le volet sécurité, je peux vous dire qu'on ne prend pas ce genre de décision à la légère et là ce sont les seuls pilotes, par la voix de leur commission, qui ont décidé si le fait de rouler de nuit était faisable. Côté spectacle, le seul véritable intérêt sera de voir, pour les téléspectateurs, une course en prime-time sachant que le c&oeligur de cible du MotoGP est l'Europe. C'est clair que, pour les fans, de se lever tôt le matin pour une course qui a lieu en Asie avant, ça n'était pas génial. Mais finir la journée, à deux heures du matin pour nous, ça n'est pas génial non plus. On fera avec.